Agent public, affectation d’office, mesure d’ordre intérieur et harcèlement moral
Une affectation d’office ne constitue pas une mesure d’ordre intérieur et peut donc faire l’objet d’un recours si elle s’inscrit dans un contexte de harcèlement moral.

Un agent public avait été affecté d'office à un autre poste alors qu’il n’était pas candidat, et était opposé à ce changement.
Après avoir formé un recours gracieux rejeté par une décision implicite, il a saisi le juge administratif afin que la décision d’affectation soit annulée. Ni le tribunal administratif, ni la cour administrative d’appel n’ont fait droit à sa demande.
En effet, selon la cour administrative d’appel « le changement d'affectation litigieux n'avait entraîné aucune modification de la situation professionnelle de la requérante tant en ce qui concerne la nature de ses fonctions que ses conditions de travail, n'avait pas porté atteinte à sa situation personnelle et n'avait pas présenté, dans les conditions où il était intervenu, le caractère d'une mesure discriminatoire ». Elle a donc jugé que cette décision d'affectation constituait une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours pour excès de pouvoir.
En revanche, le Conseil d’État vient d’annuler cette décision.
Dans un premier temps, le Conseil d’État rappelle que les mesures prises à l'égard des agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours (ex. modifications d’affectation ou de tâches) sauf si elles traduisent une discrimination ou une sanction.
Dans un second temps, le Conseil d’État précise que si l’affectation d’office s’inscrit dans un contexte de harcèlement moral, elle constitue alors une mesure susceptible de recours.
En l’espèce, l’agent faisait valoir que son affectation d'office, alors qu'il n'était pas candidat à ce poste, avait été retenue, parmi des agissements répétés et excédant les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique qui ont eu pour effet d'altérer sa santé, comme faisant partie des éléments caractérisant un harcèlement moral à son encontre par un jugement du tribunal administratif devenu définitif.
En ne recherchant pas si la décision contestée portait atteinte au droit du fonctionnaire de ne pas être soumis à un harcèlement moral, que l'intéressée tenait de son statut, ce qui exclurait de la regarder comme une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
La décision et annulée et l’affaire renvoyée devant la cour administrative d’appel.
CE 8 mars 2023, n° 451970 B
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